Nous sommes en l'an 283, dans la salle du trône du Donjon Rouge.

Selon le point de vue de Jaime Lannister du haut du Trône de Fer.


Je tache de trouver une position confortable sur ce siège de fer qui a accueilli tant de postérieurs royaux et illustres. J'ai passé une grande partie de ma vie à cheval, pourtant je n'ai jamais eu aussi mal dans mon fondement en si peu de temps. Les rois sont peut être fait différemment.
Je joue sans même y penser avec mon épée dénudée, en la faisant passer d'une main à l'autre. J'observe d'un air ennuyé le sang rouge qui coagule lentement le long de sa tranche.

Je baisse les yeux le temps d'observer ce qui reste d'Arys II Targaryen, dit Aerys le Fol, le Dément, le Taré...
Le sang a fini de s'écouler de sa gorge. Je constate que ce dernier est en train de se coaguler. Le corps ressemble désormais à un sac informe qui s'est vidé sur le sol. Je suis gêné par l'odeur d'une dépouille qui se vide. Mon odorat reste sensible et ne s'habitue pas.

A cet instant, devant ce cadavre, je ne vois pas de différence avec la carcasse d'un animal.

Je peux revoir en pensée la fin du monarque. J'ai connu des bêtes faisant face à la mort avec plus de dignité que cette fin de race. Cet homme s'est comporté comme ceux de sa lignée. Il se montrait despotique devant les faibles, lâche devant les forts.  J'ai vu la terreur dans ses yeux avant sa mort.

Je n'ai jamais compris la peur qu'inspirait les Targaryiens.
Sans les dragons des légendes, ils restent des humains pathétiques au sang malade.

« Tu as juré de protéger ton roi, pas de le juger »

Je me souviens de ces paroles prononcées par le commandant de la Garde Royale. J'assistais ce jour là au supplice des Starks devant le roi qui en jouissait comme le pervers qu'il était. Je ne suis pas un grand sensible. Pourtant, ce jour là, j'ai compris que je servais un fou dangereux. Le commandant a sans doute été alerté par mes réactions anormalement émotives. Il a compris que j'étais ébranlé. J'ai su des cet instant que je serais désormais épié et jugé. Je devais me montrer détaché et ironique pour rester intouchable. Cela ne fut pas d'une grande violence faite à ma nature. J'ai toujours donné le sentiment que rien ne pouvait m'atteindre.

Et puis est arrivée la Rébellion de Robert Baratheon. Je n'en ai pas vraiment compris la raison. Il semble que ce dernier voulait une femme encore plus que la couronne. La première est morte. Alors que la seconde ne disparait pas comme ça. On la prend ou on en crève.

Robert est prêt à marcher sur des cadavres pour cela. Sa détermination à du plaire à mon père. Quant au roi que je viens de saigner comme un porc, il n'a rien compris à ce que j'étais. Je suis le fils de mon père avant d’être qui que se soit d'autre. Des l'instant, ou ce fou m'a demandé de lui ramener la tête de Tywin Lannister, il était deja mort.

Pourtant, quand un incendie se déclare, il faut un détonateur. Quelque chose a explosé dans mon cerveau quand j'ai compris que ce vieux dégénéré allait faire cramer toute la ville. Rossart, grand alchimiste, fut envoyé de part la ville pour déclencher le Grand Feu qui devait dévorer la cité et son peuple.
Je n'aime pas les massacres inutiles et la cruauté gratuite. J'ai découvert cela ce jour là. Je peux tout accepter si cela a un sens. Mais cette folie devait être arrêtée par tous les moyens

J'ai suivi ce déchet humain de pyromant et je l'ai tué. Ce fut aussi facile que d'écraser un cafard.

J'en suis là de mes réflexions, quand j'entends clairement le martèlement des sabots d'un cheval de guerre sur les dalles du  palais. Les battants de la porte de la salle du trône se sont ouvertes en grand sur Eddard Stark à cheval. Je souris devant cette entrée digne d'un héros. Son regard saisit la situation et j'y vois un mépris incommensurable qui n'est réservé qu'à moi.

Je me lève et je bascule mon épée sanglante sur mon épaule. Je la tiens avec la même désinvolture qu'un bourreau le ferait avec sa hache.

Je regarde cet homme vertueux avec ennui. J'aimerais lui décrire le supplice atroce de son père. Pourtant, je me tais. Le chevalier qu'il est, ne voit qu'un roi assassiné et celui qui vient de l'assassiner sans remord.

Je souris encore. Je n'ai pas un instant pensé commetre à un sacrilège. Je lève les yeux au plafond, comme si un dragon allait faire son apparition et tout détruire. Mais rien... Le ciel est vide.

Je regarde de nouveau le seigneur du Nord. Je découvre que je le plains. Comme cela doit être épuisant de rester si pure.

"Rassurez-vous. Je laisse le pouvoir à  Robert avec plaisir. J'ai beaucoup d’appétit, mais pas pour cela."

De mon coté, j'ai hâte de voir les dégâts du pouvoir sur un esprit aussi excessif que celui de Robert Baratheon. Je n’espère pas de reconnaissance pour leur avoir fait gagner du temps en saignant ce roitelet. J'ai beau être plus jeune qu'Eddard Stark, je sais que nous ne sommes pas au cœur d'un roman de chevalerie.
Je suis né sans illusion.

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