A sentence, a bloodbath ✧ Eldred Morru

Les amis étaient rares dans ce bas monde, encore plus quand on avait pour nom Morru. Eldred avait pour habitude d’entendre les autres l’appeler par son nom tout en employant un ton de dégoût, comme s’il était un être dénué d’humanité. On ne l’aimait pas et il le rendait bien, pourtant, on ne pouvait pas nier sa bravoure au combat et sa loyauté. Contrairement à certains qui crachaient dans la soupe des Greyjoy, lui était un homme de parole. Il avait ployé le genou face à un roi et cet homme, même avec sa couronne brisé le demeurait toujours. Eldred était pareil en amitié, un homme fidèle et prêt à tout pour ses amis. Il n’avait pas le nom, mais au moins, il avait l’honneur de ne pas trop le salir, malgré son rire tonitruant, son langage vulgaire et ses mauvaises manières. Eldred n’était pas homme à s’ennuyer avec les conventions, il les emmerdait et vivait son existence comme il le souhaitait. Tant qu’on ne venait pas l’ennuyer, il n’ennuierait personne. Tant qu’on le laissait mener sa vie de Ferné, il n’irait pas embêter les autres, mais comme tout bon Ferné, il menait une demie vie, tout cela à cause de la Couronne, c’était pour cela que l’homme n’avait qu’un souhait, celui de conquérir les vieux préceptes d’antan et de remettre son roi sur le trône de Sel. Ce jour, il espérait le voir arriver de son vivant, comme lors de l’année 289. Jamais Eldred n’avait autant vibré que cette année-là. Il espérait pouvoir revivre cette heure et voir de nouveau le trône de Fer trembler face aux Fernés.
Eldred savait qu’il n’était pas le seul à rêver de grandeur, il avait des amis, tout aussi rejetés que lui, qui rêvait de conquérir une autre partie du monde. Gylbert Vendeloyn passait pour un illuminé à vouloir se rendre à l’ouest de Westeros, mais quel homme de l’océan n’avait pas rêvé de découvrir ce qu’il y avait ? Eldred l’avait défendu une fois dans une taverne, soutenu par son frère Tom qui lui aussi aimait explorer les océans. Il n’avait pas craint de passer pour un fou, pour lui naviguer était dans son sang. Les deux familles étaient proches, si bien qu’un jour, ils avaient voulu les unir. Eldred avait alors qu’un jeune cousin amoureux de la jeune Tori Vendeloyn et ils avaient conclu les fiançailles entre les deux jeunes gens. Une fête avait été organisé et Borys avait trop bu, sûrement aveuglé par l’amour ou par sa bêtise, il avait fini par s’étouffer avec une arête de poisson et mourir dans les minutes qui suivirent. Heureusement, cette malchance n’avait pas coûté son amitié avec les Vendeloyn. Eldred avait beaucoup ri face à l’infortune de son cousin et avait même déclaré que c’était les meilleures fiançailles auxquelles il avait assisté. Le projet fut avorté, mais Eldred avait toujours pour ambition d’unir leurs deux familles, il avait des fils, mais aussi des filles, qui pourraient très bien convenir, mais encore fallait-il que celles-ci le souhaitent. Eldred ne forcerait jamais ses enfants à épouser n’importe qui. Même s’il ne se faisait pas d’illusions sur l’amour, il ne voulait pas les contraindre et il se doutait bien qu’avec ce précepte, il ne risquerait pas de marier sa fille Halya, qui était encore plus belliqueuse que lui.

C’était la nuit et comme à son habitude Eldred était tout à ses pensées. Il dormait peu depuis qu’Aldma était morte. Souvent, son visage revenait le hanter et dans ces moments-là, l’homme revoyait les derniers jours de son épouse. Elle qui avait été si vaillante, était devenue une frêle petite chose avant de s’éteindre dans la souffrance. Pour chasser ces visions, il buvait ou il se concentrait sur ses projets et ses enfants. Parfois, il se baladait sur l’île, comme il venait de le faire en ce moment. C’est ainsi, en revenant par la plage qu’il vit au loin une lueur de bougie à travers les vitres, alors que toute la demeure semblait endormie. Sans faire de bruit, il se dirigea vers le lieu de la lueur et en poussant la porte, il découvrit la jeune Tori Vendeloyn, seule en cet endroit. Il sourit à l’intention de son invité et il se posa sur l’un des sièges et répondit aux questions de la jeune fille. Elle était un peu plus jeune que Hashly et d’âge avec ses deux derniers fils Alan et Allard.

“ Il dort d’puis un moment, je crains que notre alcool ait fini par l'assommer, il se plaignait d’un fort mal de tête.” rit l’homme, qui justement boirait bien un verre, mais il essaya de chasser cette idée, il avait promis à sa femme Gisla de limiter sa consommation.
“ Vous repartirez dans quelques jours. Vous d’vez être contente de découvrir la capitale ? Mais faites gaffe, ça pue la charogne et la pisse dans cette ville. Rien d’pire que Port-Réal pour chopper des maladies.” commenta l’homme qui avait déjà eu le loisir de se rendre dans cette infâme ville. On ne l’y reprendrait plus. Port-Réal était une fange inextricable.