[Lamarck] A la mer nous retournons | Baelon
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A la mer
nous retournons
Les minutes étaient passées avec lenteur, pourtant les yeux vairons de Rhaella étaient restés figés sur les eaux sombres. A la surface, les bulles disparaissaient maintenant, confirmant que le corps de Saera emprisonné dans son cercueil de pierre avait coulé jusqu’aux profondeurs de la mer. La jeune femme restait immobile, le regard frémissant comme une flamme, les lèvres pleines de prières qu’elle bégayait vaguement.
Dans sa mémoire, le souvenir perturbant de Naerys et Aurane était encore frais. Rhaella n’était pas une idiote, elle n’était pas si ignorante que d’autres pouvaient le penser. Elle savait ce qu’elle avait vu et surtout, elle savait pourquoi elle devait se taire : ce qu’ils faisaient était mal, ils n’avaient pas le droit. Et elle qui revenait de loin, ayant passé des mois à Villevieille, avait vu son seul bonheur s’éteindre – elle qui avait si hâte de retrouver sa sœur, sa seule joie ici à Lamarck.
Elle avait une main relevée vers son cou, empoignant les deux pendentifs qu’elle y avait accrochés – l’un était celui offert par Tregesso des années plus tôt, l’autre une étoile à sept branches. Et penchée au-dessus des flots noirs, elle murmurait prière après prière. Elle cillait avec lenteur, seulement quand ses yeux devenaient trop secs pour rester ouverts. Elle ne parvenait à se détourner de l’eau qui avait avalé sa mère.
Jamais elle ne la reverrait. Comme jamais elle n’avait revu Tregesso.
— Rhae ?
La demoiselle ne réagit pas, tout accaparée par son deuil. La petite main de Visenya se glissa autour de son bras pour la tirer vers Marée Haute. Elle voulait qu’elle rentre, bien sûr, leur défaillante famille requérait sa présence – ou plutôt, la benjamine de la fratrie craignait de supporter plus longtemps les regards haineux de leur père.
— Laisse-moi, Visenya, grommela Rhaella en s’arrachant mollement à sa poigne.
Et l’endeuillée demoiselle reporta aussitôt toute son attention sur les flots qui lui avaient pris celle qui l’avait vue naître. Elle reprit ses prières, ses lèvres les chuchotant sans produire un son. De la mer nous sommes nés, à la mer nous retournons songeait-elle amèrement. Comme ce monde était injuste. Dans son dos, Rhaella entendit des sons approcher. Pensant que Visenya revenait pour insister, elle se retourna en lançant, mauvaise :
— Je t’ai dit de me laisser !
Ses yeux tombèrent sur son cousin, qu’elle n’avait que trop peu connu jusqu’alors. Ce n’est point tant l’embarras que la confusion qui passa dans le regard de Rhaella. Et cette franche tristesse qui, toujours, flottait au fond de ses prunelles.
— Pardonnez-moi, je… croyais que c’était quelqu’un d’autre.
Dans sa mémoire, le souvenir perturbant de Naerys et Aurane était encore frais. Rhaella n’était pas une idiote, elle n’était pas si ignorante que d’autres pouvaient le penser. Elle savait ce qu’elle avait vu et surtout, elle savait pourquoi elle devait se taire : ce qu’ils faisaient était mal, ils n’avaient pas le droit. Et elle qui revenait de loin, ayant passé des mois à Villevieille, avait vu son seul bonheur s’éteindre – elle qui avait si hâte de retrouver sa sœur, sa seule joie ici à Lamarck.
Elle avait une main relevée vers son cou, empoignant les deux pendentifs qu’elle y avait accrochés – l’un était celui offert par Tregesso des années plus tôt, l’autre une étoile à sept branches. Et penchée au-dessus des flots noirs, elle murmurait prière après prière. Elle cillait avec lenteur, seulement quand ses yeux devenaient trop secs pour rester ouverts. Elle ne parvenait à se détourner de l’eau qui avait avalé sa mère.
Jamais elle ne la reverrait. Comme jamais elle n’avait revu Tregesso.
— Rhae ?
La demoiselle ne réagit pas, tout accaparée par son deuil. La petite main de Visenya se glissa autour de son bras pour la tirer vers Marée Haute. Elle voulait qu’elle rentre, bien sûr, leur défaillante famille requérait sa présence – ou plutôt, la benjamine de la fratrie craignait de supporter plus longtemps les regards haineux de leur père.
— Laisse-moi, Visenya, grommela Rhaella en s’arrachant mollement à sa poigne.
Et l’endeuillée demoiselle reporta aussitôt toute son attention sur les flots qui lui avaient pris celle qui l’avait vue naître. Elle reprit ses prières, ses lèvres les chuchotant sans produire un son. De la mer nous sommes nés, à la mer nous retournons songeait-elle amèrement. Comme ce monde était injuste. Dans son dos, Rhaella entendit des sons approcher. Pensant que Visenya revenait pour insister, elle se retourna en lançant, mauvaise :
— Je t’ai dit de me laisser !
Ses yeux tombèrent sur son cousin, qu’elle n’avait que trop peu connu jusqu’alors. Ce n’est point tant l’embarras que la confusion qui passa dans le regard de Rhaella. Et cette franche tristesse qui, toujours, flottait au fond de ses prunelles.
— Pardonnez-moi, je… croyais que c’était quelqu’un d’autre.
Rhaella Velaryon & Baelon Celtigar
An 296; lune 08; semaine 02; jour 05; Lamarck
An 296; lune 08; semaine 02; jour 05; Lamarck
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